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Comment accueillir un enfant à son retour de vacances ?

Votre enfant est parti quelques jours en vacances sans vous. Cette séparation peut-elle changer les liens qui vous unissent ? Qu’apporte-t-elle à un enfant ? Et comment préparer les retrouvailles ? Entretien avec Yann Leroux, psychologue clinicien.

Comment les séparations font-elles grandir les enfants ?

Yann Leroux : Ce qui fait grandir l'enfant, c'est qu'il est passé par la séparation et qu'il a gardé en lui l'image d'un parent aimant qu'il est certain de retrouver, en étant libéré de l'agressivité ou de la haine que suscite la séparation. Les enfants sont transformés parce qu'ils constatent que leurs peurs d'abandon n'ont pas nui à la relation avec leurs parents.

Un peu comme dans le conte du Petit Poucet : les enfants sont perdus dans la forêt par leurs parents, mais lorsqu'ils se retrouvent, ils recommencent une vie de famille normale. Finalement ce qui fait grandir, c'est d'avoir été séparé de ses parents et de renouer avec eux. Le détachement n'est intéressant que s'il permet à l'enfant de “se rattacher” à ses parents.

Est-ce la même chose en revenant de chez les grands-parents ?

Y. L. : Là, ce qui fait grandir les enfants, ce sont les récits qu'ils auront entendus, à travers les histoires, les jeux, les chansons. Ces récits peuvent aussi être “dans des objets” : les caves et les greniers recèlent des témoins prodigieux de l'histoire familiale. Une paire de jumelles ayant appartenu à un grand-oncle ou un paquet de vieilles photographies sont des invitations à rêver. Cet imaginaire est un soutien essentiel au “fait de grandir” qui ne doit pas être entravé par la culpabilité ou la honte.

Lorsque l'enfant revient avec ces récits chargés d'imaginaire, il est important de les respecter. Une histoire familiale est toujours tramée d'une multitude de points de vue. C'est cette complexité que l'enfant approche petit à petit en entendant les témoignages des uns et des autres. Il saura en faire quelque chose si cela n'est pas invalidé par ses parents. Si chacun respecte la place et la parole des autres, la multiplicité des récits prendra la forme d'une belle polyphonie.

Quand le père dit : “Tiens, c'est comme ça que ton grand-père t'a raconté cette anecdote, je vais te donner mon point de vue”, c'est une remise en ordre symbolique qui est un soutien donné à l'enfant. En revanche, ça se gâte quand les récits sont rapportés de façon conflictuelle : “Ta grand-mère raconte n'importe quoi !” Elle ne raconte pas n'importe quoi : elle raconte son histoire.

N'oublions pas que l'enfant ramène tout à lui. Il va penser : “Si mon père me dit que sa mère n'est pas valable, cela signifie que mes parents ne sont pas valables !” S'il constate une véritable mésentente entre ses parents et ses grands-parents, il va se demander pourquoi on l'envoie chez eux. La règle de base est d'envoyer son enfant chez une personne en qui on a toute confiance.

Les conditions du retour à la maison sont-elles importantes ?

Y. L. : Oui. Rien ne se fait naturellement. Le retour d'un enfant se prépare toujours. Il ne devrait pas avoir l'impression d'arriver comme un chien dans un jeu de quilles. Retrouver sa chambre en travaux ou des parents indisponibles est difficile pour un enfant, car cela lui donne l'impression qu'il n'est pas attendu. Il est donc souhaitable que l'enfant ait le temps de retrouver sa famille et de se retrouver avec elle.

Quel sentiment est réactivé par ces retrouvailles ?

Y. L. : Ces retrouvailles font écho à toutes les autres retrouvailles, et à la première d'entre elles : la manière dont l'enfant a été accueilli à sa naissance ! C'est difficile parce que pendant un temps, chacun a vécu des expériences et des temporalités différentes. L'autre est quelqu'un avec des désirs, des exigences, et des conduites qui sont tantôt source de plaisir et tantôt source de déplaisir.

Le 26 juillet 2013 Propos de Yann Leroux, psychologue clinicien au Centre médico psycho pédagogique de Périgueux, recueillis par Maria Poblete